mardi 24 février 2009

Trois héros



En 1999, le magazine Time célébrait trois acteurs de premier plan qui auraient sauvé le monde, sans savoir que dix années plus tard ils allaient être au centre de toutes les condamnations. Cruelle ironie.
On leur impute aujourd'hui des décisions cataclysmiques qui ont encouragé la crise financière et économique. Qui sont ces trois dude? A notre droite, nous avons Larry Summers, regard un peu vide, absorbé dans son bleu pâle, double menton et la réputation de dire crûment ce qu'il pense ("Je pense que la logique économique qui veut que des masses de déchets toxiques soient déversées là où les salaires sont les plus faibles est imparable. » ou encore ces propos sur la faiblesse des femmes en mathématiques), rien n'arrête ce brillant économiste qui atteint le poste de secrétaire d'Etat au Trésor, poste qui lui était destiné, lui fils d'un couple d'économistes, neveu d'un ou deux prix nobel de la discipline (Samuelson et Arrow), un héritier qui n'a pas déçu, donc. L'homme a, sous son activité, promulgué l'abrogation du Glass-Steagall Act, loi votée en 1933, qui, tirant les leçons de la Crise, instaurait l'impossibilité de marier une banque de dépôts avec une banque d'investissement. En l'autorisant, pour faciliter à l'époque la naissance de Citigroup, Summers n'imaginait pas que ce diabolique mélange des genres allaient mettre le feu au poudre. Les banques d'investissment tapaient dans les fonds propres de la partie dépôt, pour alimenter leur machinerie financière. C'est ainsi que Northern Rock, respectable banque à papa, a été acculé à la faillite dans la même foulée que Bear Stearns, richissime banque d'investissement, disait adieu au royaume des vivants et de l'argent-roi. Il faut dire que l'argent coulait à flot, avant les scandales qui tétanisent le monde capitaliste, et s'il y en avait à ne plus savoir qu'en faire, on le doit à un homme, un génie déchu, Alan Greenspan. Alan Greenspan, l'iconoclaste, un mélange de Woody Allen et de Panoramix, que tout le monde célébrait, joueur de saxophone et amateur de belles-lettres, il était l'américain intellectuel et pragmatique que le monde enviait à l'Amérique, un Obama avant l'heure en quelque sorte. En tant que directeur de la FED et donc pilote de la politique monétaire de la première puissance du monde et donc du monde, il a maintenu artificiellement les taux d'intérêt à un niveau extrêmement bas pour pousser les agents économiques à la consommation. Devant un tel afflux de liquidités, les financiers ont inventé des instruments financiers (l'économiste Bouzou invoque Schumpeter pour parler des conséquences néfastes de l'innovation dans l'ingénierie financière) et mis au point le fameux "effet de levier" qui allait disséminer le risque en s'enrichissant par la dette. L'effet de levier faisait des miracles, des fusions-acquisitions gargantuesques, une croissance qui semblait infinie, le temps était au beau fixe, avant que la dette ne servit plus qu'à financer, faute de débouchés, des canaux insolvables. On aboutit pour l'heure à des bilans calamiteux et la crise du crédit. Enfin, à notre gauche, Robert E. Rubin, des faux airs d'Attali grisonnant, est voué aux gémonies, (nommé parmi les 10 personnalités les moins éthiques du business par Marketwatch), une sorte d'Hiltler de la finance, parce qu'il participe activement en tant que consultant grassement rémunéré à la déconfiture de Citigroup, importante banque américaine.
Mesdames, Messieurs, les héros d'hier sont les bouc-émissaires d'aujourd'hui.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Mon dieu! Un témoin de la bien-pensance... Polluons "Allègre ment"
http://www.wikio.fr/video/888921

K. von Gibus a dit…

Merci pour le lien. Je note que son retour sur le devant de la scène coïncide avec un engagement politique plus prononcé, dans la veine de Cali.

L'allégeance idéologique comme facteur de promotion?