Le 6 novembre (1812) le thermomètre descendit à dix-huit degrés au-dessous de zéro : tout disparaît sous la blancheur universelle. Les soldats sans chaussures sentent leur pied mourir; leurs doigts violâtres et roidis laissent échapper le mousquet dont le toucher brûle; leurs cheveux se hérissent de givre, leurs barbes de leur haleine congelée; leurs méchants habits deviennent une casaque de verglas. Ils tombent, la neige les couvre; ils forment sur le sol de petits sillons de tombeaux. On ne sait plus de quel côté les fleuves coulent; on est obligé de casser la glace pour apprendre à quel orient il faut se diriger. Egarés dans l'étendue, les divers corps font des feux de bataillon pour se rappeler et se reconnaître, de même que des vaisseaux en péril tirent le canon de détresse. Les sapins changés en cristaux immobiles s'élèvent çà et là, candélabres de ces pompes funèbres. Des corbeaux et des meutes de chiens blancs sans maîtres suivaient à distance cette retraite de cadavres.
Que c'est beau! Les doigts gourds dans la littérature, les doigts gourds dans la légende des siècles!
A apprendre par cœur et à réciter quand nous serons tous en exil.
p.206-207
Que c'est beau! Les doigts gourds dans la littérature, les doigts gourds dans la légende des siècles!
A apprendre par cœur et à réciter quand nous serons tous en exil.
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