mercredi 23 décembre 2009

La folle de Chaillot

Contrairement à ce qu'en croient les mauvaises langues, le critique de la rubrique théâtre de la dernière heure ne fait pas que chômer, puisqu'il a daigné quitté ses pantoufles pas plus tard que la semaine dernière et se rendre dans un théâtre pour la première fois de la saison (qui a débuté en septembre). On voit plus bas ce qu'il nous en a péniblement pondu.

J'aime aller au Théâtre du Parc (au "TP" diraient les parisiens qui aiment utiliser les abréviations que son administration lui concocte), on y est accueilli par un personnel qui est redoutablement mieux habillé que nous, qui soigne le rituel de sorte à ce qu'on ne pense pas assister à une représentation scolaire. La salle est tout en splendeur, les sièges confortables et le public, quoique belge, de bonne tenue. Belle pompe. Pour je ne sais quelle raison, un soir, j'ai abandonné l'idée de regarder un match de football à la télévision pour m'y rendre, on y jouait la Folle de Chaillot de Giraudoux dont j'ignorais en bon journaliste de la dernière heure, à peu près tout.

Une femme, une illuminée qui habite nos rues, une femme dont on se détourne de crainte qu'elle ne nous adresse la parole, entreprend de réunir les petites gens de son quartier pour s'opposer à des investisseurs convaincus que le sol de Chaillot recèle de pétrole. Dans le premier acte, dans un bar, la France villageoise papillonne autour du monde de l'argent, petit costume sombre, air de secret et manières de parvenu. Ils se racontent le nouveau monde et ses méthodes. On les voit se frotter les mains sales. C'est savoureux. Je ne suis pas très "bohème", pourtant. J'aime Dieu et l'argent. C'est à ce moment d'ailleurs quand pris par la vigueur du dialogue, j'ai failli me lever pour crier mon assentiment, c'était vibrant, palpitant et bien j'aurais dû. J'avais lu un article sur l'ancien patron de Siemens qui avait quitté son poste suite à un scandale et qui occupe désormais la tête d'une autre incontournable entreprise. J'aurais crié, "je les connais! je connais leur nom! il y a Klaus Kleinfeld, il y a Bernard-Henry Lévy...", ces hommes sont tout en haut et s'échangent les rôles. Pour une pièce écrite en 1945, c'est troublant. Lors de l'entracte, nos excellents comédiens nous ont vendu des bibelots, les temps sont rudes pour la profession et je regrettai qu'ils ne soient millionnaires. J'ai pensé aussi sournoisement au match de football que je manquais et à ses acteurs autrement considérés, autrement rétribués. Lors du second acte, on y retrouve le sens du spectacle qui distingue ce théâtre ,à travers le décor ambitieux et grandiose comme sur une scène d'opéra. La rencontre entre les trois folles est longue et on s'ennuie un peu. En revanche, la prestation du chiffonnier est enthousiasmante et remporte la mise d'un sentiment final de satisfaction et de plaisirs repus.

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