Hier, comme l'eût dit, Herr Camus, c'était Théâtre, ce soir. Et pas n'importe où, chers amis, puisque nous avons choisi pour la première fois de nous déplacer au théâtre Royal du Parc, écrin somptuaire où peuvent se tasser plus de sept cents personnes d'excellente compagnie bourgeoise, pour assister à la représentation d'une pièce à costume, l'Aiglon, dont mon infamante inculture ignorait tout. Par souci d'économie malvenu, le couple que nous formions avec Elle s'installa au troisième balcon où nous eûmes pour des gens de notre respectabilité, distance et hauteur, mais surtout hauteur qui me fit craindre le confort d'un spectateur d'un match de foot-ball dans un "parcage" visiteur. Il n'en fut rien ni des vues imparfaites et lointaines, ni de la promiscuité beuglante de quelque manière que ce soit. L'Aiglon versifie la vie et la mort de Napoléon II. L'empereur Napoléon II, duc de Reichstadt et roi de Rome, a régné sans le savoir en France pendant quatre ou cinq jours. Il est le fils de Napoléon et de Marie-Louise d'Autriche, qui enfermé dans son existence monarchique viennoise ne rêvera que d'être le digne et épique héritier de son fameux et admiré paternel. Le héros est déchiré entre sa langueur et fragilité austro-germanique et sa vaillance, son entêtement et son héroïsme français. Il voudrait être à la hauteur de son sang bouillonnant, il mourra d'une fièvre, ne pouvant que reproduire des batailles par le biais de ses soldats de bois repeinturlurés sous l'œil sévère de Metternich. Il est amusant de noter que l'auteur, français, a décrit des caractères nationaux à l'inverse de ceux perçus à l'étranger. Raffiné à l'extrême, manièré et indécis pour l'étranger proche, le français n'est pas ce monstre de volonté bravade et épique qu'Edmond Rostand lie à l'atavisme gaulois.
En léger différé
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